1 - YANGON
Le présent change tout le temps, l'avenir est imprévisible ....Mon blog a été "bloqué" ou "censuré" dès mon arrivée en Birmanie ; il m'a fallu attendre le Vietnam pour le publier. Vraiment ... imprévisible !!
Après trois petits vols qui se sont enchaînés au dessus de nuées de nuages floconneux et 7 heures plus tard je vais découvrir un autre monde...hors du temps.
J'arrive à Yangon (Rangoon) l'ancienne capitale du Myanmar (Birmanie), certains me disent 40 000 habitants, d'autres 4 millions en comptant les banlieues...Allez donc savoir.
L''aéroport déjà, montre tous ses ors...
Mais aucun.problème au passage de la douane.
Ma guide « Tin Tin » (eh oui comme notre Tintin national !), m'attend.
Une jeune femme très cultivée, qui parle un anglais remarquable, dont le mari est mort d'une cyhrose du foie (on boit beaucoup ici), et se débrouille seule avec une petite fille de 10 ans. Elle se montrera pleine de gentillesse et d'attention à mon égard pendant les 3 jours à venir.
Je suis très surprise : le long du trajet entre l'aéroport et la ville, ce ne sont que larges et belles avenues bordées d'arbres, de parcs immenses, de somptueuses demeures autour du lac Inya le plus grand de Yangon. J'apprends que c'est le quartier des « officiels » et des « politiques ». Nous passons devant l'Université le quartier de la résidence surveillée de la « dame de Yangon »...
La pagode "Shwedagon"
L'hôtel est situé tout près de la célèbre et incontournable pagode « Shwedagon »,( Shwe signifie « or » en birman et « pagode » lieu de prière) pagode sacrée depuis plus de 2500 ans, coeur de la vie religieuse, sociale et politique du pays. Je pars la visiter seule à pied très tôt le matin : le site ouvre à 4h!. Il est immense, véritable ville dans la ville. Et il faut bien le dire, absolument superbe. Je découvre un monde fantastique à la rencontre du bouddhisme et de l'animisme. Etonnant. Le grand stûpa d'or central (le « zedi » en Birmanie), de 100 mètres de hauteur, recouvert de 700 kg d'or brille dans la lumière matinale, sa girouette et son globe incrustés de milliers de pierres précieuses. Tout autour, des monastères, des abris de pélerins, des pagodons, des « tazaung » (petit stûpa) de toutes tailles parmi une multitude de toitures à étages, de pinacles, de flèches, d' oratoires ...
Ici comme partout ailleurs, le culte animiste des nats coexiste avec le bouddhisme. Les nats sont les esprits tutélaires des lieux. Ils y en a 37. Les offrandes quotidiennes qui leur sont faites sont destinées à conjurer le mauvais sort. Les birmans accrochent les statuettes des esprits aux branches des arbres.
J'ai eu la chance de rencontrer un vieux professeur d'histoire – 76 ans, sans travail, car son enseignement ne convenait pas aux autorités, et sans aucune retraite - qui m'a expliqué tout un tas de choses moyennant tout de même 4 dollars. C'est ainsi qu'il m'a fait faire ma prière puis m'a donné sa « bénédiction» devant le « bouddha du mardi » puisque je suis née un mardi : j'ai du verser un verre d'eau sur la tête dudit Bouddha et il a tenu ma main pendant qu'il récitait la prière ...
En effet , autour des pagodes, de petits autels marquent les 8 jours de la semaine (le mercredi est divisé en deux le matin et l'après midi) : chaque jour est symbolisé par une planète , un chiffre, et représenté par un animal. Je suis née un mardi (comme Pierrot) : mon chiffre c'est le 3 mon signe la lune et mon animal le tigre. C'est parait-il le meilleur jour : j'ai un 6ème sens!, donc je devrais avoir beaucoup de chance dans ma vie... (ou ce qu'il en reste :). Bien sûr il est recommandé de déposer son offrande dans la « donation boxe ». Il y en a une auprès de chaque autel, de chaque tazaung.
L'atmosphère est au recueillement et l' ambiance bon-enfant.
En Birmanie les femmes et les hommes portent tous et partout, tout le temps, le traditionnel
« Longyi », qui s'appelle aussi « Htame » pour les femmes qui le nouent sur le côté, et « Pasoe » pour les hommes qui le nouent devant.
Le longyi des femmes est souvent à motifs géométriques, plutôt coloré.
Celui des hommes vert ou brun foncé à petits carreaux.
Les femmes ont toutes les cheveux longs ramassés en des chignons cylindriques. Les enfants qui vont à l'école portent des uniformes : chemises blanches et longyi verts. Mais la couleur peut varier selon leur lieu de résidence.
Ci dessous l'esplanade de la Pagode Shwedagon, qui m'a vraiment émerveillée par sa beauté et son atmosphère si sereine.
Puis je pars au hasard vers le centre ville.
Là les choses changent complètement. Une ambiance tout à fait indienne, comme un peu partout d'ailleurs en Birmanie, celle-ci étant une ancienne province « anglo-indienne », et cela se voit ! Il y a ici énormément d'indiens, ou de gens de descendance indienne. On y parle un tout petit peu mieux anglais qu'au Laos, et c'est tant mieux pour moi! Mais j'aurais tout de même beaucoup de mal à les comprendre à cause de leur fichu accent.
Le centre ville est dans l'ensemble en pleine décrépitude : partout d'anciens immeubles coloniaux décatis qui tombent en lambeaux et des trottoirs complètement défoncés, plein de trous qui peuvent être dangereux la nuit..Mieux vaut donc toujours avoir sa lampe de poche sur soi. D'autant plus que les trottoirs sont envahis de marchands à la roulotte et de tout un bric à brac incroyable... Les plus grandes avenues parallèles, sont coupées par de petites ruelles piétonnes qui valent vraiment le détour : tellement de fils électriques et autres, partout au dessus des têtes, qu'ils forment une vraie toiture laissant à peine filtrer le soleil, ce n'est pas plus mal car cela apporte un peu de fraîcheur et fait scintiller les lumières et les couleurs...Il faut se frayer son chemin à travers la foule grouillante et les échoppes qui envahissent tout.
Quant à l'état des taxis ...je vous laisse juger ! Même les billets ont un goût de vieux...
Tous les cultes sont pratiqués: j'ai vu une église catholique, une grande mosquée, une église anglicane, et bien sûr tout un tas de temples hindous et bouddhistes.
Enfin déjeuner local dans le quartier chinois : j'ai dû me tromper de commande car on m'a servi des viscères de poisson ... pas trop à mon goût !
Ensuite j'ai tout vomi ...
Voilà qui finit bien ma première journée, pleine de contrastes, en Birmanie . Un pays qui, je le sens déjà, va me marquer profondément.
2 - BAGO:
Le lendemain route vers le sud avec Tin Tin : 4 h de voiture pour atteindre le Rocher d'or dans l'Etat Môn.
La route est belle, moins défoncée que d'habitude (mais tout est relatif), le paysage est luxuriant, très cultivé, surtout de rizières vert fluo car c'est le début de la deuxième plantation de riz. On y voit aussi d'immenses espaces de plantation de teck et de palmiers à huile, sur des terrains ayant manifestement fait l'objet de déforestations par brulis. On traverse de petits villages très pauvres, sur le bord de la route.
Maisons de paille et bambou, sur pilotis comme au Laos, chars tirés par des boeufs, femmes qui portent d'énormes paniers d'osier sur la tête, comme en Inde.
A 80 km de Yangon, premier arrêt sur la route à BAGO, capitale d'un royaume MON, connue autrefois sous le nom de PEGU, chef lieu de la division de Bago, pour y voir la pagode Shwemawdaw qui culmine à 114 m., date du 1er millénaire, et est surtout connue pour la chute du « bourgeon de bananier » de son stûpa qui s'est écroulé en 1917, et est resté là depuis cette chute ... il est donc particulièrement vénéré.
Tin Tin m'a bien expliqué la composition d'un stûpa :
- Tout en haut le globe d'or recouvert de pierres précieuses
- une tige sur laquelle est fixée une girouette incrustée aussi de pierres précieuses
- en dessous l'ombrelle « de Mindon » entourée de cloches (la Shwedagon a 1400 cloches)
- un bourgeon de bananier
- une fleur de lotus (symbole de la sagesse de Bouddha)
- un bol à aumônes renversé
- une cloche
- plusieurs terrasses superposées
- la base du stûpa entouré de pagodons
Dans une autre pagode de Bago, on peut voir un très grand (et tout neuf) bouddha couché ( le Bouddha couché de Shwemawdaw) dans la position de la « relaxation totale » de 55 m de long, et dont les dessins sculptés sur ses immenses pieds racontent les préceptes bouddhistes.
3 - le ROCHER d'OR (le KYAIK-HTI-YO).
Une vraie merveille, j'ai adoré cet endroit. Un côté Bénares et cour des miracles, les infirmes en moins.
Effectivement considéré comme l'une des trois merveilles du pays, avec la pagode Shwedagon de Yangon, et le Mont Popa de Bagan.
Le Rocher d'Or fait l'objet d'un pèlerinage essentiel pour tout bouddhiste, comme la Mecque pour un musulman.
Il faut bien comprendre que l'on ne monte pas au Rocher d'or (1400 m d'altitude) comme ça!...
On s'arrête en bas à la « station », on y laisse la voiture, pour prendre un « truck », seul autorisé à effectuer la bonne heure de "grimpette" par une petite route très pentue et cahoteuse. Chaque truck part lorsqu'il a fait le plein de voyageurs serrés sur des bancs de bois, les valises entassées comme on peut à l'arrière du véhicule. 50 « locaux » autorisés au maximum (qui est souvent dépassé...) ou 20 phalangs (étrangers). Tin Tin a bien négocié l'affaire et nous avons pu monter, à l'aller comme au retour, dans un truck pour les locaux, moyennant une négociation assez épique, sur le siège avant à côté du chauffeur ( qui conduit pieds nus!) !! Ouf, merci pour mon dos !!.
Cela ne s'arrête pas là : arrivé sur l'esplanade en terre entourée de boutiques, on est loin d'être arrivé : il faut GRIMPER A PIED !... les « porteurs » se précipitent pour vendre leur services ... les chaises à baldaquin sont de service pour les personnes en difficulté... et nous voilà parties, à pied cette fois, pour une heure de grimpette supplémentaire. Notre porteuse de sacs était jeune, veuve (elle aussi : cyhrose...) et mère d'une petite fille de 3 ans qui nous accompagnait sans broncher avec des tongs qui faisaient « couic couic » à chaque pas ... Elle m'a vraiment fait de la peine. Nous l'avons reprise au retour, et en nous quittant, elle a pleuré.
Il y a ce rocher, qui tient en équilibre au bord du précipice retenu bien sûr par un cheveu de Bouddha, recouvert d'or ( que seuls les hommes ont le droit d'appliquer et de toucher),
mais il y a surtout ici, autour du centre du site, en descendant les ruelles qui l'entourent (on a compté avec Tin Tin, que l'on avait descendu et monté plus de mille marches - très hautes en plus!- un site immense, un spectacle permanent de traditions culturelles en tous genres, de scènes de la vie quotidienne, qui surprennent, choquent ou émerveillent les visiteurs occidentaux. Abris pour pélerins, boutiques de bouddhasseries et souvenirs, effluves odorantes des gros bâtons d'encens incandescents plantés dans des vasques sur trépieds, groupes de pélerins accroupis qui psalmodient, prières incessantes et tintinnabulements de mille clochettes invisibles agitées par la brise du soir. Un autre monde. Tellement riche.
Et une rencontre très sympathique avec un groupe de jeunes filles (des lycéennes venues visiter le site) ...qui ne voulaient plus me laisser partir !
Préparation du bétel : feuilles de bétel, chaux, et noix d'arec .
Les ingrédients culinaires aussi sont hallucinants et j'ai beaucoup appris à ce sujet grâce à Tin Tin. Elle m'a appris à reconnaître les palmira nuts ( du palmier) , les ice potatoes, l'arbre des noix de cajou, les différentes sortes de mangues, les Yarn ou sweet potatoes ... m'a fait goûter au yellow sticky rice (un riz de désert mélangé a du curcuma, du sucre, de la noix de coco ), aux différents tempora ou samosa ( beignets fourrés et frits à l'huile ).
Tin Tin m'a expliqué comment on faisait la poudre de Thanaka dont les femmes se badigeonnent le visage pour avoir une belle peau et rester fraîches (on mélange tout simplement de la poudre de bois de thanaka avec de l'eau sur une plaque de métal. La poudre de tanaka est aussi réputée pour son effet antiseptique.
Enfin j'ai été initiée à la fabrication du "bétel" : sur des feuilles de bétel qui ressemblent à des feuilles de thé, on dépose un peu de chaux (oxyde de calcium) et de la noix d'arec, on replie, la préparation prend le nom de bétel et c'est prêt à être mastiqué puis craché ... la salive devient rouge sous l'effet conjugué de la chaux et de l'arec.
On en trouve partout, à tous les coins de rue.
Poudre de tanaka:
Tin Tin attablée pour la dégustation de beignets :
J'ai aussi tenté le massage de jambes très local, , dans la rue, à l'huile « miraculeuse » de plantes sauvages, au milieu de grappes de bois de santal. Cela m'a fait beaucoup de bien après toutes ces marches grimpées!
Sur le site du Rocher d'or, il y a beaucoup de femmes et de fillettes, des hommes aussi, qui travaillent dur, pendant que les bonzesses, en robe orangée et crâne rasé viennent en pélerinage, et que les moines en robe grenat font l'aumône:
Notre hôtel était très bien situé à 250m de l'entrée du site, j'ai pu ainsi y retourner plusieurs fois, notamment au coucher du soleil, pour m'en mettre plein les yeux et la tête.
Ces deux jours passés au Rocher d'Or ont été absolument merveilleux :
Merci Tin Tin !