Départ pour Mandalay (capitale de la « Division de Mandalay ») située à 650 km au nord de Rangoon, 1 million d'habitants, dernière capitale royale, plus de 150 monastères et 100 OOO moines (mon guide me disait un million au total dans la Province!), d'où son importance pendant la « révolte des moines » en 2007, et la surveillance militaire particulière dont elle fait l'objet aujourd'hui. Mais je dois être honnête, je n'ai rien ressenti de tel.
Capitale aussi des P : Porcs, Prostituées, Pagodes, Parias, et Prêtes disait George Orwell dans son livre « Une histoire birmane »... et de la Police secrète ajoute le « Routard ». C'est encore vrai aujourd'hui : il faudrait juste remplacer « prêtres » par « moines ».
Justement, pour faire entièrement « routarde » j'ai laissé ma grosse valise à Rangoun, où je la retrouverais dans 10 jours, et suis partie avec un petit sac de 3 kg acheté 3 euros. au marché du coin. Juste un change, une paire de tongs, une lampe de poche et ma brosse à dent ... et c'est reparti pour l'aventure!
Et pour mon carnet de route ...
Le quel commence ainsi : dans le taxi qui me conduisait à l'aéroport, j'ai oublié mon porte- monnaie avec ma carte de crédit et ma carte d'identité ... je devrais le récupérer à mon retour ... sans les dollars qui eux ont paraît- il, disparu ! « No problem » ...
Mandalay est une ville complètement différente Yangon, moins « policée » parfois. Elle est située dans une vaste plaine, non loin de l'Irrawaddy. C'est le centre commercial du pays. Les paysages qui l'entourent sont magnifiques et pleins de surprises!
Quadrillée comme New York, au carré, en rues et avenues, je suis donc 26ème rue/82ème avenue ...
La circulation, très dense et confuse, est un vrai cirque qui vaut son pesant d'or (de l'or toujours et encore !). Aucune règle de circulation, aucun feu (les rares qui existent ne servent à rien), pas de passage piétons, c'est la débrouille pour traverser au péril de sa vie entre véhicules d'un autre âge (j'ai vu une vieille voiture italienne de 1950!), scooters, vélos, tuk-tuk, rickshaw et compagnie..C'est le règne du klaxon ... Si l'on ajoute que les trottoirs sont, non seulement couverts de flaques rouges de crachats de bétel, encombrés de marchandises en tous genres, de gargottes, de cyclo... mais aussi complètement défoncés, et qu'il faut à chaque pas faire attention à ne pas mettre le pied dans un trou ou une bouche d'égout, on imagine sans peine que la vie du piéton n'est pas facile !! Toute une expédition, avec la lampe torche obligatoire le soir !! Il faut dire que la grande majorité des conducteurs n'ont pas le permis de conduire (en fait certains l'ont mais ils ont du verser un bakchich pour ça!).
Cependant ici les gens sont vraiment très gentils, ce soir encore un homme me voyant hésiter à traverser m'a demandé si j'étais « OK? » et puis comme il a compris que je voulais juste me rendre à l' hôtel de l'autre côté de la rue, il a arrêter la circulation, m'a attrapée par le bras et m'a fait traverser ! J'ai trouvé ça super gentil! Les jeunes me paraissent aussi plus rapides et malins que les Lao et n'hésitent pas à venir en aide.
Ce qui frappe c'est la grande mixité de populations : beaucoup d'indiens (mauvaise réputation de « menteurs » sic) et de chinois (encore pire) venus pour le business et autres .. De nombreux birmans sont d'ailleurs métissés et la couleur de leur peau varie du clair au très foncé. Beaucoup de chinois aussi . Les religions aussi sont multiples : temples hindous, bouddhistes, églises anglicanes, et mosquées, et même des témoins de Jehovah!
La pauvreté atteint des proportions inimaginables. Beaucoup de mendiants et de clochards dans les rues. Le salaire moyen d'un serveur de resto est de 40 dollars par mois, celui d'un enseignant de 60 dollars ... Le salaire moyen de moins d'un dollar par jour. L'école est payante : 50 dollars par an minimum pour envoyer son enfant à l'école. C'est sûr que lorsqu'on a 5 enfants comme c'est la moyenne ici, ce n'est pas facile ... Un bon moyen de maintenir les pauvres pauvres et les riches riches !! D'ailleurs, les hôtels « d'État » sont de vraies pompes à fric : il font tout payer un prix exorbitant y compris la tasse de thé vert -1 dollar- qui est normalement gratuite dans tous les cafés et restaurants ! Et l'Etat perçot une taxe sur tout (laverie, repas, internet ...)
Le tourisme est en baisse : 1% du PIB, alors qu'il était de 5% il y a 5 ans. La faute à la dictature disent les gens. On m'a dit aussi que ça commençait à repartir.
Et pour un birman qui voudrait se rendre à l'étranger, ce qui est pratiquement impossible, il faut d'abord verser 5 à 600 dollars à l'Etat avant d'essayer d'obtenir un visa ! De toutes les rencontres que j'ai fait en Birmanie, guide compris, pas une seule personne n'est jamais sortie de son pays.
Quant à la religion principale, mélange de bouddhisme et d'animisme, elle est omniprésente, avec des milliers de monastères, de temples et de pagodes : 300 dans la seule ville de Mandalay! Et le paysage est parsemé à perte de vue, de stûpas dorés ou blanchis à la chaux, c'est très beau.
J'en ai visité plusieurs pendant un circuit de 2 jours Mandalay-Amarapura-Sagaing-Mingun.
Un circuit vraiment très intéressant au cours duquel on s'arrête admirer l'artisanat local qui est merveilleux : entre sculpteurs (marbre, pierre, bois) ateliers de tissage de soie et de coton, fabrication de marionnettes, de bijoux, et même des artiste-peintres, les birmans sont de merveilleux créateurs.
Départ vers Mingun en bateau, Marionnettes, Frappe des feuilles d'or (on les agrandit 7 fois) pour coller s les stûpas,
Enfin une visite à ne pas manquer : celle du marché Zegyo, le plus grand jamais vu, les Galeries Lafayette style Birmanie ! On y trouve de tout sur 4 étages, on peut même se faire confectionner des habits sur place, au dernier étage, par des couturières qui utilisent des machines de 1940. Ce marché « couvert » se prolonge à l'extérieur par un immense marché alimentaire extraordinaire! Moi qui adore les marchés, ce fut un vrai régal :)
Les deux derniers jours que j'ai passé seule dans la ville m'ont permis de découvrir autre chose que ce que veulent bien nous montrer les tours-opérateurs, de recueillir des témoignages et de confirmer ma première impression : Mandalay est une ville d'une saleté, d'une pollution, d'une misère inimaginables. Les gens sont gentils certes, mais ils s'ennuient, -surtout les gens d'un certain âge-, dorment dans la rue, vivent au jour le jour de débrouille à 3 sous, ils ont peur, ils sont tristes sous leur apparence joyeuse. Par exemple souvent les petits serveurs de gargote se mettent à chanter à tue- tête, ce qui me surprenait au début , et puis j'ai compris que c'était pour tuer l'ennui et essayer de se mettre un peu de baume au coeur.
J'ai rencontré un couple de français qui arrivait d'un voyage en bus de nuit. Ils m'ont raconté leur aventure : le bus s'est arrêté en cours de route près d'un marché de nuit, quand des policiers sont arrivés et ont matraqué à mort un jeune qui venait soit disant de voler quelque chose au marché ... sauf qu'ils n'ont rien trouvé . Tout le monde faisait semblant « de ne pas voir » ... Le gamin a été ligoté et emmené sur une moto en très mauvais état.
Plus loin, le bus a fait l'objet d'un contrôle : les policiers s'en sont pris sans aucune raison à deux jeunes juste parce qu'ils avaient un look un peu « punk ».Ils les ont fouillés de fond en comble. La aussi ils m'ont raconté que les gens du bus sont restés impassibles, détournant la tête ... et que les 2 jeunes sont restés très dignes, faisant preuve d'un beau courage.
Et puis j'ai rencontré un jeune sur le quel je ne dirai rien ici, qui m'a fait des confidences à voix basse. Il ne souhaite qu'une chose : partir. Quitter son pays. Je garde de lui un souvenir ému et finis par comprendre cette tristesse qui se lit en filigrane sur les visages, cachée sous les sourires et les « hello! ».
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