Départ de Mandalay tôt le matin pour Bagan en « speed boat » ... lequel porte bien son nom puisque nous avons mis 9 heures pour descendre l'Irrawaddy et les 208 km qui séparent les deux villes ! Le matin il faisait très froid et à midi une chaleur caniculaire ... un peu longuet mais tranquille et un très beau paysage, le long des rives plates et sablonneuses bordées de cultures de toutes sortes de granulés et d'arbres : des « dani » ou palmiers Nipah à l'extrémité des feuilles jaunies, de cocotiers et d' arbres du voyageur avec leur feuilles en éventail, d''épicéas, de forêts d'acajou, de bosquets de bambous ... et des buffles d'eau à la couleur caramel. Nous croisons d'immenses barques chargées de centaines de troncs de teck énormes, mais peu de pêcheurs. Sur la route des femmes n'hésitent pas à se tremper pour approcher le bateau etnous lancer des bananes contre quelques kyats ...
Bagan est aujourd'hui divisée en deux : « New Bagan » et « Old Bagan ».
En fait il s'agit plutôt de groupes de villages. Après que ses habitants ont été « délogés » il y a 20 ans, vers New Bagan, Vieux Bagan est désormais exclusivement un site archéologique, où se dressent des centaines de temples (2219 exactement) construits entre le 11ème et le 13ème siècle par les souverains successifs.
Je suis logée à « New Bagan », dans le plus charmant des hôtels depuis le début de mon voyage, un « hôtel de charme », très calme... Je vais enfin pouvoir me reposer du vacarme de Mandalay. Mais c'est un « hôtel d'Etat » bien sûr et les services annexes sont hyper chers. Donc je vais tout boycotter comme d'habitude, ce qui va m'amener à faire de belles rencontres...
Au bout de 3 jours, tout le monde me connait dans « ma rue » (qui est un chemin de terre ), et Kiu Kiu, rencontrée par hasard au marché où je suis allée acheter un pull en prévision du froid du lac Inle, va me faire visiter son atelier de peintures qu'elle vend à l'entrée des temples, ensuite elle m'emmène au pas de course (j'ai du mal à la suivre) par des petits chemins de sable, jusque sur les bords du fleuve voir un temple, puis au retour elle me conduit au seul endroit de Bagan où l'on peut trouver un bon taux de change ( 1 dollar pour 800 Kyats - prononcer « chatte » - alors qu'à l'hôtel et partout ailleurs c'est 1 dollar pour.. 700 K au mieux....il n'y a pas de cours officiel ici, c'est la débrouille, au meilleur offrant), Enfin elle m'emmène déjeuner dans un resto à 1000 K où je partage mon plat avec elle, et me régale !
En fin d'après midi, je vais essayer un massage de pied à l'hôtel car je me souviens avec bonheur de celui de Paksé ... mais ici c'est 3 fois plus cher : 10 000 K! Tant pis, j'y vais! Une heure pendant laquelle je vais encore découvrir beaucoup de choses : la jeune fille qui s'occupe de moi est bien triste sous son sourire de convenance : le matin elle commence à 10h pour aider au ménage des chambres, ensuite c'est à la cuisine, et enfin au « spa » jusqu'à 10h du soir ! Trois autres de ses collègues arrivent : même scénario : toutes sont tellement fatiguées, qu'elles vont s'asseoir par terre dans un coin en se parlant à voix basse, et ne bougent plus. Pour rentrer chez elles elles devront faire une demie heure de marche à pied dans la nuit. Dur dur ...
Le lendemain matin je pars visiter quelques uns des plus célèbres temples ... Je ne peux quand même pas venir ici sans aller voir quelques temples comme tout le monde! Alors c'est parti pour le Shwezigon, l'Ananda et quelques autres... je dois dire qu'une fois encore je suis ravie. Ces temples sont fabuleux. Surtout les plus grands, très différents les uns des autres. Je ne m'en lasse pas. La guide qui m'accompagne parle si vite anglais et avec un tel accent que j'ai du mal à suivre d'autant plus que ses explications sont très pointues.. mais peu importe. C'était très beau !
Bon, peut être pas aussi beau que la "Basilique Notre Dame d'Afrique " à Alger ...mais quand même .... et puis chacun prie le dieu qu'il peut !
Au passage visite d'une fabrication d'objet d'art en laque Je ne savais pas que la laque provient du suc d'un arbre : le laquier. C'est très très long de faire des objets en bambou recouverts de laque (plusieurs semaines). La laque est marron : c'est par coloration qu'elle devient noire.C'est une des plus importante spécialité de Birmanie.
Par curiosité je vais faire un tour à l'école primaire du coin ... et j'y rencontre une jeune fille Thidar , 21 ans, qui a l'air très attachée à ses études et très intelligente . Elle m'a donné RV pour diner chez elle le lendemain! ... on verra bien.
En attendant, au petit resto chinois du coin, on vient m'offrir des bananes flambées pour mon dessert... je n'en reviens pas!
De nouveau je rencontre Kiu Kiu et je vais chercher mon ordinateur pour lui montrer les photos que j'ai prises d'elle la veille : elle est très contente. Elle me propose de m'arranger un tour « pas cher », en « horse -car » pour le lendemain matin... OK ça marche.
Une demie-heure de horse- car jusqu'au village très rustique et typique de Minnanthu : des paillotes sur pilotis avec des murs en bambou tressé comme au Laos. Chaque maison est séparée des autres par une rangée de cactus : les cactus servent à faire des médicaments contre la douleur. Une femme coupe le foin de manioc pour nourrir les cochons, une autre me montre comment filer le coton sur un rouet tandis que dans la cour les « plums » deviennent rouges en séchant au soleil: leur graines serviront à faire du piment .
C'est le moyen- âge.
Mais j'ai le dos en compote à cause de la carriole qui n'a plus de suspension et des cailloux sur la route en mauvais état, malgré toujours les femmes qui y travaillent, alors je décide de rentrer.
Sur la route toujours l'étonnant spectacle : des buffles qui trainent les charrettes, des boeufs et des chèvres qui se promènent au milieu des pagodes, une multitude d'acacias : leur fleurs jaunes se récoltent, après les avoir fait sécher, on les mélange à des cacahouètes et à du piment pour les déguster en apéritif. Des tamarins dont les pétales de fleur séchés et sucrés, feront de délicieux bonbons.
la Birmanie c'est vraiment un voyage hors du temps.
Je m'arrête pour déjeuner rapidement dans un restaurant de bord de route : je suis seule dans la salle, mais bientôt entourée de 5 serveurs qui sont au petits soins, m'offrent du thé vert, des pea nuts avec un bouillon de légumes (mélange de Chaman yuet et de Manla hou ... bon j'ai noté les noms pour leur faire plaisir, mais j'ai rien compris ... sauf peut être le manla hou que le garçon est allé me chercher en cuisine pour me le montrer et qui me semble être du navet).
J'achète 2 gros paquets de gâteaux pour le dîner du soir au cas où ... on ne sait jamais !
Je rentre à l'hôtel pour me reposer un peu au bord de la piscine, quand j'entends des chuchotements de derrière la haie : Matine ! Matine!... quelqu'un m'appelle : je m'approche et c'est Kiu Kiu venue me remettre un cadeau « pour souvenir » : un joli bol en laque !! je n'en reviens pas et ne sais comment la remercier ... je vais lui chercher un de mes T-shirt et lui donne avec mon adresse et mon e – mail. Elle n'a pas d' e- mail, ne sait même pas se servir d'un ordinateur, mais me dit qu'elle va se débrouiller ... Des enfants s'approchent aussi pour me donner des fleurs de bougainvilliers par dessus la haie
Et puis en effet le soir Thidar m'attend devant l'hôtel : elle s'est fait toute belle avec une jolie robe rouge qui change un peu des longyi, et s'est lavé les cheveux. Elle m'emmène jusqu'à sa « case » car on ne peux appeler ça autrement : une cabane de plein pied en bambou, environ 15 m2, sans fenêtre, sans électricité, sans eau bien sûr (il faut aller la chercher à fontaine) et ils vivent au moins à 10 là dedans! Kiu Kiu est là aussi , elles se connaissent. Nous montons les 3 marches de l'échelle pour s'installer dans la « mezzanine » accroupies par terre sur une natte en bambou... éclairées par une bougie. Des tapis sont roulés dans un coin. Mais elle a mis une nappe sur la petite table ronde, et c'est elle-même qui a préparé le diner : riz accompagné de plusieurs petites assiettes qu'elle place au milieu de la table : légumes, quelques morceaux de bœuf bouilli, du piment et des tomates. Elle me sert elle-même une assiette énorme. Je prie le bon dieu pour n'être pas malade car les assiettes rincées à l'eau du bassin ne sont même pas essuyées ... bon, on verra bien... heureusement j'ai ma petite bouteille d'eau dans mon sac :). Elle gronde très fort Kiu Kiu qui ne veut pas manger ...je ne sais pas pourquoi... mystère. Les autres membres de la famille sont restés en bas et nous regardent en attendant que ça se passe ! Le repas est joyeux, je les fais rire !
Thidar m'explique qu'elle veut devenir guide. Pour l'instant elle en est au 5ème grade de high school , il lui en reste 5 à faire avant de pouvoir entrer à l'université. Elle travaille à mi temps comme employée de maison chez son professeur principal pour pouvoir se payer l'école. Quand elle aura fini, elle fera un break d'une année pour travailler et gagner de l'argent pour la fac ! Elle compte qu'elle aura alors 31 ans ! Mais elle m'a l'air très volontaire et très bonne élève, ce que me confirme Kiu Kiu . Elle prend beaucoup de plaisir à me montrer ses cahiers de mathématiques, histoire-géo, anglais. Elle a une adresse internet et me fait promettre de lui écrire.
Une petite heure plus tard, toutes les deux me raccompagnent. Il commence à faire froid. Thidar me dit qu'elle n'a pas de couverture, et que quand il fait froid elle dort toute habillée!
Nous nous quittons avec tristesse et je promets de revenir ...
Avec le jeune de Mandalay , Kiu Kiu et Thidar seront mes plus belles rencontres.
Je rentre un peu abattue à l'hôtel où des « femmes-girafes » sont entrain de faire des pitreries devant une horde de touristes français qui vient de débarquer ... Ce sont des Danaung, une ethnie du nord de l'État Shan. Bien triste ... je m'éclipse.
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