Histoire des Incas
Depuis quelques années tous les spécialistes sont d'accord pour affirmer que les ancêtres des hommes que découvrit Christophe Colomb en 1492 arrivèrent d'Asie par le détroit de Béring ... Il se pourrait que les premiers découvreurs asiatiques aient été aussi des navigateurs.... Si l'on est pratiquement d'accord sur la provenance, par contre la date d'arrivée fait encore problème... entre
15 000 et 50 000 ans ??
La préhistoire péruvienne il y a plus de 14 000 ans des petits groupes de chasseurs et cueilleurs parcouraient la côte centrale du Pérou. A la fin de la période glaciaire la côte entre dans un processus de désertification. Les groupes humains se fixent alors à l'embouchure des rivières qui descendent des Andes. Le développement de l'agriculture (calebasses, haricots, coton, amarante , piment, quinoa, courges , maïs) et de l'élevage (lama, cobaye) permet la sédentarisation et la concentration de populations, qui 2000 avant JC maîtrisent la céramique et construisent leurs premiers monuments . Le premier grand foyer culturel à imposer son rayonnement sera celui de Chavin dans les Andes septentrionales.
CHAVIN creuset de toutes les civilisations de l'Ancien Pérou (1000 av JC)
Environ 1000 ans avant J.C., voire un peu plus, apparaît une nouvelle aire culturelle qui s'étend à partir des Andes centrales jusqu'à la forêt amazonienne et à la Côte Pacifique. Il ne s'agit pas encore d'un état, mais d'un ensemble de chefferies à caractère théocratique. De nombreux lieux de culte sont bâtis. Le principal est CHAVIN DE HUANTAR, un temple en pierre sur le versant oriental de la cordillère. Trois éléments jouent un rôle fondamental: le jaguar, le rapace (aigle ou condor), le serpent. Ces trois éléments mythiques et symboliques vont se retrouver dans toutes les civilisations qui succéderont à Chavin. Ils constituent les motifs principaux de la céramique très élaborée de cette époque, une céramique qui, par son réalisme, nous apporte de précieuses informations sur la vie et l'environnement des populations.
De grands caciquats (tribus dirigées par des caciques) se développent, en même temps qu'apparaît la spécialisation des fonctions au sein de l'élite.
Les civilisations de la côte (100 av JC - 600) :
Tout au long de la côte, dans les "vallées oasis" se développent plusieurs civilisations séparées les unes des autres par d'immenses étendues désertiques. Ces petits états dont les capitales sont aussi de grands centres cérémoniels vont produire une céramique tout à fait remarquable. A défaut d'écriture c'est grâce à ces représentations que nous pouvons reconstituer l'environnement de ces civilisations.
Parmi ces nombreuses cultures côtières deux sont particulièrement importantes: la culture NAZCA et la culture MOCHICA.
La culture NAZCA: cette aire culturelle va se développer pendant près d'un millénaire, avec une période d'apogée aux alentours du 4ème siècle. Situé dans le sud du Pérou cet état construisit un important centre cérémoniel. De nos jours les Nazcas sont surtout connus pour les mystérieuses lignes qu'ils tracèrent au milieu du désert et dont la signification nous reste encore inconnue. Des innombrables tombes retrouvées dans cette région, on a exhumé de très nombreuses momies enveloppées dans de somptueux tissus et de superbes céramiques à la décoration très raffinée.
La culture MOCHICA: située dans le nord du Pérou, va porter la céramique à son niveau le plus élaboré.
les Pemiers Empires: TIAHUANACO et HUARI (600 à 1000)
Au cours du premier millénaire de notre ère se constituent deux empires importants
TIAHUANACO tient son nom du principal centre cérémoniel situé à quelques kilomètres du lac Titicaca, sur le territoire bolivien actuel. C'est une théocratie qui fait ériger un gigantesque temple dans lequel se trouvait la célèbre porte du soleil, monument emblématique de cette civilisation, sur le fronton de laquelle est représenté un personnage mythique, probablement devenu "huaca" (intermédiaire entre les hommes et l'au-delà), que l'on retrouve dans la plupart des céramiques et tissages produit par cette culture. Ce temple, renfermant de nombreuses statues, est remarquable par la qualité du travail de la pierre. Cette civilisation disparaît vers l'an 1000.
HUARI, dont la capitale se situe près de l'actuelle Ayacucho, apparaît un peu plus tardivement . A partir de cette région andine les Huaris partiront à la conquête de nombreuses régions pour finalement constituer un empire englobant une grande partie des Andes et de la côte sud du Pérou (absorbant entre autre Nazca et Pachacamac). Ce peuple construira de véritables cités très structurées, entourées d'une enceinte, comportant de nombreuses maisons à étage, .
Les Huaris sont des artistes remarquables. Les tissages sont d'une haute qualité technique aux motifs abstraits et géométriques. L'empire disparaît aussi vers l'an 1000.
Les Etats régionaux ( 900 à 1400 après J.C.)
La côte voit de nouveau fleurirent des états régionaux qui dans une organisation politique différente reprendront les acquis artistiques des civilisations précédentes en y apportant un peu de sang neuf. Parmi tous ces états: c'est celui de CHIMU qui revêt un intérêt tout particulier car il a laissé une cité remarquable par sa dimension et son organisation: CHAN CHAN.
Le premier embryon d'état CHIMU apparaît dès le 9ème siècle, près de la ville actuelle de Trujillo.
La capitale, Chan Chan, construite en adobe (terre crue) se modifiera au gré du développement de l'état et des aléas climatiques. Sans cesse partiellement détruite, agrandie, remodelée, c'est l'une des plus importantes cités du Nouveau Monde (20 km²). Dans cette immense ville résident l'élite politique et religieuse, mais aussi les commerçants, les serviteurs et les artisans. Chaque catégorie occupe un secteur spécifique, reflet de la division de la société Chimu en castes. Tous les murs de séparation et les bâtiments sont richement décorés avec des hauts reliefs faits de motifs d'inspiration locale (poissons, pélicans...) La société Chimu produira un nombre impressionnant de céramiques, généralement moulées.
Cet état sera finalement intégré à l'Empire Inca en 1470..
Les souverians Incas :
EMPIRE HISTORIQUE :
.MANCO CAPAC : le premier inca, fils du soleil fonda Cuzco au 12ème siècle. L'Empire Inca commença sa lente expansion autour de cette ville
· Inca Roca...................................début du XIVème siècle
· Yahuar Huacac.........................moitié du XIVème siècle
·Viracocha Inca (URCO)................fin du XIVème siècle
· Pachacutec (Tito Cusi Yupangui) 1438-1471
le 9ème Inca, repoussa ses frontières jusqu'au Chili et soumit presque toutes les Andes centrales
· Son fils, Tupac Yupanqui 1471 -1493 étendit le territoire inca de Quito en Equateur, jusqu'à Santiago du Chili
· Huayna Capac................................................1493 - 1525, le petit fils de Pachacutec, pénétra en Colombie et s'établit à Quito, qui devint la capitale du Nord
· Huascar...........................................................1525 - 1532
· Atahuallpa.......................................................1532 - 1533
Organisation et fonctionnement de l'Empire :
Tout comme le fondateur mythique, Manco Capac, l'empereur est un orphelin qui ne possède rien lorsqu'il arrive au pouvoir. Chez les Incas, à la mort du chef suprême, celui qui prend la succession doit renoncer à toute forme de filiation et d'héritage pour former une nouvelle lignée.
Les Incas n'inventent pas la totalité de leur organisation, mais reprennent bons nombres de structures existantes dans les territoires conquis.
La ville de Cuzco est divisée depuis toujours en 4 parties, chacune administrée par un chef distinct. L'Empire étendra cette division à la totalité du territoire (10 millions d'habitants pour 100 000 incas environ. Les 4 sections: composent ensemble le "Tahuantinsuyu" (le pays des quatre directions).
Lire à ce sujet le livre de Maria Rostoworoski "la historia del Tahuatinsuyv"
L'ensemble de l'état est divisé en structures de plus en plus petites pour arriver jusqu'à celles de base comprenant une dizaine de familles (l'Ayllu). L'organisation territoriale aussi bien que l'administration est organisée de façon pyramidale, une pyramide au sommet de laquelle se retrouve l'Inca.
Pour pouvoir contrôler et administrer l'Empire on construit tout un ensemble de routes, généralement empierrées qui sillonnent les Andes et la Côte. Elles servent à faire circuler les marchandises, les hommes, les soldats, mais aussi l'information. Grâce à un système de messagers qui se relaient, les Chasquis, les nouvelles circulent d'un bout à l'autre de l'Empire en un temps record (8 jours de Quito à Cuzco), une formidable machine administrative qui sera capable de maintenir une cohésion importante sur un territoire aussi vaste et aussi disparate.
L'AYLLU, base de l'organisation sociale andine :
L'Ayllu ne s'est pas imposé avec la domination inca, il existait chez la plupart des tribus andines.
Un Ayllu correspond à un village. Le territoire de l'Ayllu, appelé marka, couvre souvent de grands dénivelés puisque certains s'étirent depuis les basses terres tropicales jusqu'aux sommets andins.
A la tête de chaque Ayllu se trouve un Curaka généralement descendant du fondateur de la communauté. La vénération d'une divinité tutélaire la waka renforce la cohésion sociale. Le kuraka s'occupe entre autre de l'attribution des terres. En effet la marka est la propriété de l'ensemble de l'Ayllu. Les pâturages d'altitude sont utilisés librement par chaque famille qui y fait paître ses lamas et alpagas. Par contre les terrains agricoles sont attribués en usufruit à chaque famille en fonction de ses besoins. Après la disparition de la famille ces terres sont réintégrées au fond commun. La production quant à elle est privée, mais entre les familles existent un système d'entraide l'ayni.
Nombre de tâches sont consacrées à la communauté. Tous les hommes "adultes" (c'est-à-dire mariés) doivent une période de travail, appelé mita, au profit du kuraka. Durant la mita le kuraka a l'obligation de prendre totalement en charge les personnes qui travaillent pour lui. En contrepartie de cette mita dont il bénéficie le kuraka doit assistance, sur ses propres ressources, à tous les démunis: les veuves, ceux qui sont victimes de mauvaises récoltes...
Chacun doit aussi participer aux tâches collectives que sont par exemple l'entretien des chemins ou des réseaux d'irrigation.
La notion de tribut n'existe pas, il n'existe aucune forme d'impôt.
Pourtant ce système n'était pas parfait. Nombre de Curakas se sont enrichis grâce à la mita, formant une véritable caste supérieure les kapa, polygames, vivant dans l'opulence, transmettant à leur descendance position titres et richesses.
La production agricole :
L'économie de l'Empire Inca est avant tout fondée sur l'agriculture. Les ayllus sont les principaux centres de production.
Lorsque les Incas fondent leur empire il y a déjà de nombreux siècles que les ethnies andines ont développé une production agricole variée, surtout de montagne.
La base de la production et par conséquent de l'alimentation c'est la pomme de terre et de nombreux autres tubercules... Les tubercules étant très sensibles aux conditions climatiques la récolte n'est jamais garantie. Pour cette raison ont été développées des techniques de conservation basée sur la déshydratation; le chuñu, pomme de terre déshydratée peut se conserver plusieurs années.
La principale céréale est la quinoa riche en sels minéraux et en protéines qui peut se cultiver jusqu'à 4000 m d'altitude.
Le maïs fort apprécié ne peut pousser que dans des endroits biens spécifiques, principalement les flancs des vallées. La plupart des fameuses terrasses incas ont été construites pour permettre sa culture.
Dans les zones appropriées les populations cultivaient aussi les haricots, les courges, les tomates, les cacahuètes, les piments, et dans les parties basses la coca. Cette plante joue un rôle très important, car outre que sa feuille est mâchée, elle est indispensable à tous les rituels. Toute cérémonie comporte une offrande de coca à la Pachamama, la terre mère.
Lamas et alpagas sont élevés pour la viande et pour leur laine utilisée pour le tissage des vêtements.
Les échanges commerciaux se font sur la base du troc puisque cette société ignore l'usage de la monnaie.
Dans chaque communauté une partie des terres est cultivée au profit des prêtres et de l'Inca.
CUZCO, capitale de l'Empire :
Lorsque les Espagnols s'emparèrent de la capitale de l'Empire Inca ils furent surpris par sa dimension et son organisation.
Pachacutec transforme cette simple bourgade de cabanes en une ville de 60000 habitants.
L'édifice principal de la ville est le Korikancha, le temple du soleil, entièrement construit en pierres parfaitement ajustées. L'or (qui n'a aucune valeur pour les Incas) s'y trouve à profusion; il recouvre certains murs et est utilisé pour les statues du jardin. La représentation de l'astre divin est faite avec ce métal entouré de pierres précieuses...
La place principale de la ville est entourée des principaux palais. La plupart des édifices sont en pierres très bien travaillées.
La ville proprement dite est surmontée par le site de Sacsawaman, forteresse ou lieu de culte, un ensemble mégalithique impressionnant, et qui serait la tête d'un puma dont le corps est constitué par la partie basse de la cité...
Plus qu'un centre administratif Cuzco est le cœur spirituel et religieux de l'Empire. C'est le pivot autour duquel se sont construits les mythes fondateurs et fédérateurs. C'est en son cœur que l'Empereur ordonne le chaos en mettant en contact les univers des dieux, des hommes et des morts.
Pourtant sous le règne de Wayna Capac (1500) la mythique Cuzco perd de son importance au profit de la nouvelle Tumipampa bâtie au Nord de l'Empire (l'actuelle Cuenca, en Équateur)
Le Culte du Soleil , ciment de l'Empire :
Pour les Incas et nombre de leurs prédécesseurs VIRACOCHA (qui prend le nom de PACHACAMAC sur la côte) est la divinité créatrice qui serait sortie du Lac Titicaca pour créer la vie et les hommes.
Les Incas, peuple très religieux comme tous les peuples de l'ancien Pérou, choisissent de développer le culte d'INTI, le soleil, qui plus qu'une divinité est un ancêtre totémique. D'ailleurs son culte ne survivra pas à l'effondrement de l'Empire. Ce soleil ancêtre commun à toute la tribu a, en toute logique, pour représentant sur terre l'Inca lui-même.
A travers tout l'empire des temples lui sont consacrés. Le principal étant bien évidemment le Korikancha de Cuzco. De nombreuses personnes sont au service de ces temples et du culte. Les prêtres sont chargés des rituels et des sacrifices. Ils sont chargés des nombreuses cérémonies qui jalonnent le cours de l'année. Les VIERGES DU SOLEIL sont des jeunes filles qui ont été enlevées à leur famille pendant leur enfance; certaines d'entre elles font office de concubines de l'empereur, d'autres sont employées dans les ateliers de tissage, et le dernier groupe se consacre totalement au temple en restant cloîtrées jusqu'à la fin de leurs jours.
Tout peuple conquis par les Incas est tenu d'adopter le culte du Soleil. C'est en fait un instrument mis à profit par l'Inca pour imposer sa volonté et asseoir son pouvoir.
Le Soleil n'est pas le seul astre qui soit vénéré. Il y a aussi des cultes à la Lune, à Vénus, aux Pléiades.
Mais au quotidien le peuple se tourne plutôt vers des divinités secondaires, aux attributs bien précis, et que l'on implore pour résoudre les problèmes de la vie de tous les jours.
Les Apus, les montagnes, sont des lieux de culte privilégiés. Les sommets andins sont vénérés et servent d'autels à sacrifice pour les différentes divinités. Dernièrement on a retrouvé des témoignages de cérémonies s'étant déroulées sur des sommets à près de 6000 m d'altitude
L'ordre social Inca :
1 - L' INCA (l'empereur)
2 - OREJONES (grandes oreilles)
Noblesse de sang et de privilège: Panaca ou lignage impérial et parentèle de l'Inca - Grands seigneurs et guerriers
Noblesse territoriale: Curacas, grands fonctionnaires de l'état, gouverneurs, administrateurs
Aristocratie sacerdotale: Vierges du Soleil, les femmes choisies de l'Inca, les prêtres
3 - ELITE
Artisans qualifiés, quipucamayocs, chasquis, colons loyaux, gens honorables
4 - HATUN RUNAS
La majorité des gens du peuple
5 - CLASSE INFERIEURE
Mitmaes (clans déportés)
Yanaconas (personnes déchues en punition)
Les "quipus" au service de la statistique Inca :
Les Incas comme tous les peuples d'Amérique du Sud ne possédaient pas d'écriture, pourtant le bon fonctionnement de l'empire dépendait en grande partie de statistiques élaborées et d'un art de la prévision abouti.
Sur l'ensemble du territoire tout est comptabilisé, répertorié. Il faut connaître la population, la production afin de garantir à tous le minimum vital et pouvoir anticiper les besoins. On répertorie donc les habitants (recensement tous les deux ans), les animaux, les productions agricoles et artisanales, les stocks. Toutes ces données remontent jusqu'à la tête de l'état et sont centralisées pour avoir une vision globale de la situation du pays.
A défaut d'écriture les Incas vont développer un système inédit d'enregistrement des données: le QUIPU : l'élément de base du quipu est un fil, de laine, de coton, de fibre d'agave, voire de cheveu, sur lequel on fait des nœuds. La position et la forme de ceux-ci donnent des indications sur l'élément répertorié et la quantité. La grosseur et la couleur du brin sont aussi des éléments de classification. Toutes ces cordelettes sont réunies entre elles dans un grand ensemble formant un faisceau que seuls des experts sont capables d'utiliser pour réunir les données et les interpréter quand c'est nécessaire.
Par cette méthode les administrateurs de l'Empire possèdent une véritable base de données. On connaît le nombre d'habitants par sexe et par âge, mais on a aussi des informations sur leur état de santé. La laine est répertoriée par couleur. Même la quantité d'excréments séchés de lama (le principal combustible domestique) est connue! Il semble que certains quipus servent même à enregistrer des dates importantes de l'histoire.
Ce système très élaboré de l'art de la statistique et de la prévision, associé à l'imposition d'une langue de communication unique (au quotidien les populations continuent à parler une multitude de langues) le QUECHUA explique en grande partie la solidité d'un empire aussi vaste et aussi composite.
L'architecture Inca :
La consolidation et la gestion de l'Empire emploient beaucoup d'hommes, d'énergie et de compétences. Les Incas utilisent donc plutôt les savoirs existants, ainsi que ceux des peuples soumis; ce ne sont pas de grands innovateurs.
Pourtant il y a un domaine pour lequel on peut considérer qu'il y a un "avant" et un "après" inca, c'est celui de l'architecture. Il y a un changement important par rapport au passé, non pas tant par le type de construction, mais davantage par l'incroyable qualité du travail des matériaux utilisés. Aucune civilisation dans l'histoire de l'humanité n'a travaillé la pierre avec la précision des Incas.
Ce qui frappe le visiteur c'est l'uniformité de l'architecture inca; on a l'impression qu'il y a eu un seul architecte!
Ce savoir-faire est utilisé dans tous les domaines de la vie. De l'agriculture au sacré toutes les composantes de la nation bénéficie de ce savoir-faire. Ce sont les impressionnants réseaux de canaux d'irrigation, utilisés jusqu'à aujourd'hui, qui permettent l'agriculture dans des zones semi-désertiques. C'est l'incroyable réseau routier de 40 000 km qui sillonne l'empire et franchit les obstacles andins grâce à des ponts suspendus en liane ou en pierre. Ce sont les indispensables forteresses qui protègent le pays des invasions. Ce sont les palais et les temples souvent recouverts d'or et d'argent.
Tous les bâtiments ont recours au même type d'architecture, à savoir des murs inclinés vers l'intérieur et des ouvertures trapézoïdales. Les murs extérieurs peuvent être plans ou circulaires (le Korikancha par exemple) Par contre l'incapacité à construire des voûtes oblige les artisans incas à ne poser que de simples toits de chaume au-dessus de ces murs si parfaits.
la région de Cuzco a de nombreux sites (palais , forteresses, centres religieux ...mais l'emblème de l'Empire Inca est le Machu Picchu ... que nous allons visiter et j'y reviendrai )
Les arts et les sciences
Dans le domaine artistique les Incas n'atteignent pas le niveau de la plupart de leurs prédécesseurs, comme si leur souci d'efficacité les avait empêchés de laisser libre cours à leur imagination.
Les céramiques sont richement colorées et ornées de motifs géométriques sans grandes variantes. Les formes sont finalement plus variées que les ornements. Comme dans toutes les civilisations précolombiennes c'est la céramique funéraire qui est la plus élaborée.
Par contre les Incas se distinguent des autres cultures par l'utilisation plus importantes du bois (ce qui suppose des échanges avec l'Amazonie), en particulier pour le façonnage des keros, sortes de verres ou de vases tronconiques, souvent ornés de peintures figuratives.
Des Chimus ils apprirent l'art de l'orfèvrerie, toutefois sans arriver à les égaler. Ils travaillent l'or, l'argent, le cuivre, l'étain, le platine, et sont capables de réaliser de nombreux alliages dans des fours à haute température les huayras. Les objets et bijoux sont élaborés par martelage, soudure et la technique de la cire perdue. Une grande partie de cette production sert à orner les temples et à couvrir de bijoux les dignitaires de l'Empire qui en sont parés en fonction de leur rang social.
L'absence d'écriture a contraint les Incas à pratiquer une littérature orale. Les amawtas sont les dépositaires et les transmetteurs des récits historiques et légendaires. La richesse de la langue quechua a permis un développement important de la poésie.
Cette littérature fut le premier moyen pour les conquérants de recueillir de recueillir des bribes de l'histoire andine.
Cette absence d'écriture est aussi un frein important pour l'acquisition de véritables connaissances scientifiques. Les Incas possèdent quelques connaissances en astronomie et grâce à un système d'abaque ils réalisent quelques calculs simples. Cette méconnaissance rend encore plus admirables leurs réalisations architecturales
Le domaine dans lequel ils sont probablement plus compétents que leurs homologues européens de l'époque c'est la médecine. Leur connaissance des plantes est très poussée, la pharmacopée qu'ils en tirent est remarquable et efficace pour guérir de nombreux problèmes de santé. Ils pratiquent même la trépanation.
La conquête espagnole et la fin de l'Empire Inca :
En 1528 l'empereur Hayna Capac meurt à Tumipampa (Equateur), nouveau siège du pouvoir impérial. Parmi sa nombreuse descendance deux de ses fils sont susceptibles de lui succéder: Atahualpa qui l'a accompagné dans le Nord de l'empire, et Huascar son demi-frère restait à Cuzco. C'est Huascar qui est intronisé et une lutte fratricide qui s'engage. Finalement Huascar est tué au combat. Le pouvoir revient donc à Atahualpa.
Mais alors que celui-ci monte sur le trône d'étranges hommes barbus débarquent en avril 1532 à Tumbes. Francisco Pizarro à la tête de 180 aventuriers part à la conquête du plus vaste empire du continent.
Parmi tous les peuples conquis par les Incas nombreux sont ceux qui n'apprécient pas le joug de leur nouveau maître, aussi n'hésitent-ils pas à s'allier aux nouveaux arrivants. C'est donc à la tête d'une véritable armée que Pizarro arrive à Cajamarca, dans le nord, où se trouve Atahualpa. Celui-ci tellement sûr de sa supériorité ne se méfie pas et accepte de rencontrer le chef espagnol. Pizarro sans aucun scrupule le fait arrêter, et malgré le versement d'une importante rançon en métaux précieux le fait exécuter.
Avec la mort d'Atahualpa, dans un système aussi hiérarchisé, c'est tout le pays qui devient orphelin et s'effondre. La route de la conquête est ouverte, les conquistadores partent en direction de Cuzco, dont ils se rendront maître après de durs combats. Le temps des Incas est terminé, et les Espagnols avides de richesses et imbus de leur supériorité feront tout pour faire disparaître toute trace de ce vaste empire.
La population ravagée par les maladies arrivées d'Europe et les mauvais traitements ne pourra jamais, jusqu'à aujourd'hui, retrouver sa splendeur et surtout sa dignité.
Les Incas aujourd'hui :
D'une telle civilisation qui domina un territoire aussi vaste est-il raisonnable de croire que toute trace ait disparu?
Un élément important de cette civilisation survit toujours:
- la langue : Le Quechua, langue officielle de communication à l'intérieur de l'Empire, continuera à se développer après la disparition de celui-ci. Les missionnaires prendront vite conscience de l'importance de cet outil pour l'évangélisation des Indiens. C'est donc en Quechua qu'ils convertiront des millions de personne de gré ou de force. Résultat: aujourd'hui ce sont 7 millions de sud-américains qui parlent Quechua, depuis la Colombie jusqu'au Nord de l'Argentine.
Le Pérou et la Bolivie sont les deux pays d'Amérique du Sud qui totalisent la plus forte population indienne avec 18 millions d'Indiens sur les 20 millions du sous-continent (12 pour le Pérou et 6 pour la Bolivie)
- Autre structure qui a subsisté, surtout en Bolivie, c'est l'ayllu, cette organisation villageoise basée sur la solidarité de l'ensemble de la communauté. La privatisation des terres n'a pas encore réussi à le faire disparaître. Il sert même souvent de modèle pour développer de nouvelles structures solidaires.
- Il est pratiquement impossible de faire disparaître d'un coup de baguette magique des croyances enracinées depuis des siècles dans les consciences. Certes les descendants des Incas ont adopté un catholicisme de surface, mais en grattant ce vernis on s'aperçoit que les cultes contemporains sont simplement plaqués sur les croyances venues du plus lointain passé , et c'est tant mieux!.
- Peut-être avec des arrières pensées mercantiles, ou par une tentative de récupération intellectuelle, certains tentent de faire revivre les coutumes anciennes. La fête de l'Intiraymi, qui se déroule à Cuzco chaque 24 juin, est un bel exemple de cette ambiguïté.
Les états andins ne paient-ils pas un lourd tribut au fait d'avoir toujours refusé ce métissage culturel. Les sociétés contemporaines ne se porteraient-elles pas mieux si elles arrivaient à intégrer ce double héritage pour construire un monde dans lequel chacun retrouverait ses repères?
Merci à l'Association "Partage sans frontière" pour tous ses articles : http://www.partage-sans-frontieres.org
Je rappelle également le lien du très intéressant article de Valérie Robin "Amérique latine , histoire et mémoire" : http://www.alhim.revues.org/98
et recommande le livre de Carmen Bernand "les Incas, Peuple du Soleil" Editions "Découvertes Gallimard" -Histoire n° 37
celui de Sebastien Jallade "Espíritu pampa, sur le chemin des Andes" , Editions Transboréal
ainsi que : "Civilisation andine - Pérou - Bolivie" - Carnet de route Marcus i
et les guides "Routard" et "Lonely Planet" bien sûr... !