Angkor, qui signifie « Ville Capitale », classée au Patrimoine mondial de l'UNESCO en 1992, est le lieu où les rois Khmers ont établi le siège de leur royaume entre 800 et 1430, avant de déménager à Phnom Penh. Actuellement Angkor est un vaste site historique qui s'étend sur plusieurs dizaines de km2 et se situe à environ 10 km de la ville de Siem Reap (qui ne présente pas d'intérêt particulier si ce n'est son aéroport et ses hôtels pour touristes).
Coup du sort, le chauffeur qui nous a amenés de l'aéroport à l'hôtel, nous dit qu'il est aussi guide (ce que doivent dire tous les chauffeurs de taxi). Mais pour un tel site, il faut absolument avoir un très bon guide (ou alors un bouquin super détaillé) car ce n'est pas une visite de tout repos, il y a tellement de choses à lire ou à interpréter dans ces constructions que le non spécialiste s'y perd !! Mais ce chauffeur-guide nous a fait une bonne impression sur le trajet... Allez hop, c'est avec lui que nous partons à l'aventure !
Avec ce guide anglophone vraiment très cultivé et intéressant, nous avons visité attentivement 6 temples : Angkor Vat, Ta Prohm, Angkor Thom, Banteay Srei, Beng Mealea et le groupe de Roluos. En résumé, ci-dessous voici ce qu'il nous a appris.
La visite de ces temples prend toute sa signification à la lumière de l'histoire du royaume et des légendes qui fondent l'Hindouisme et le Bouddhisme : à son accession au trône, chaque roi construit un nouveau temple dédié à la divinité à laquelle il souhaite que le royaume voue un culte, et dont les murs du temple narrent les exploits. C'est ainsi qu'environ 3000 temples ont été construits sur le territoire du royaume Khmer (qui, à son apogée en 1220, s'étendait sur le Vietnam, le Laos, une partie de la Thaïlande et de la Chine), il en reste environ 1000 sur le territoire de l'actuel Cambodge.
Ces temples ont été construits en latérite (une pierre rose, facile à extraire qui devient très dure et granuleuse au soleil, ce qui la rend difficile à sculpter et explique qu'elle n'ait servi que pour les fondations et les murs non visibles) et en grès (une pierre qui donne aux temples leur couleur grise, facile à sculpter et utilisée pour les fresques et bas reliefs). Les temples sont entourés d'eau, se composent généralement de trois enceintes dont la dernière contient la ou les tours-sanctuaires sacrées, en forme de fleur de lotus fermée qui symbolise le royaume des dieux Hindous (le Mont Méru entouré des 7 océans, où vivent les 39 divinités – cf article précédent). La tour centrale enferme la statue de la divinité que consacre le temple. Seul le roi pouvait se rendre dans cette dernière enceinte (3 fois par jour) et le temple était habité et entretenu par des centaines, voire des milliers de citoyens. Une ou deux fois par ans le roi ouvrait le temple au peuple pour qu'il vienne y célébrer la divinité. Shiva a d'abord été la divinité la plus célébrée (de 800 à 1100), puis Vishnu (pendant le règne du roi guerrier Suryavarman II) et enfin Bouddha (comme 10ème réincarnation de Vishnu, sous le règne du roi le plus puissant Jayavarman VII, qui marquera le début de la transition de l'Hindouisme au Bouddhisme).
Quelques images et légendes ...
Temple de Banteay Srei (" Citadelle des femmes"), milieu du Xè siècle, construit par un des gurus du Roi Jayavarman V à qui il est dédié.
Bantea Srei : Narasimba (homme à tête et griffes de lion, une des réincarnations de Vishnu) déchire la poitrine du roi des asuras (guerriers humains et souvent ennemis des dieux) Hiranyakaçipu.
Bantea Srei : Indra (dieu de la pluie reconnaissable à son éléphant à 3 têtes, en haut) envoie une énorme pluie (les vagues) sur la forêt Khandava pour protéger les villageois qui y vivent, en éteignant le feu allumé par Agni (dieu du feu) qui voulait tuer son ennemi le serpent (nâga) Takshaka, au centre. Heureusement que Krishna (une des réincarnations de Vishnu, à gauche sur le char) passait par là : il peut lancer un rideau de flèches si serrées que la pluie ne peut pas tomber !
Le fameux Makara, le plus dangereux des serpents, qui crache des Nâgas (serpents à 5, 7, ou 9 têtes). Sa tête est en bas à gauche de la photo et celles du Nâga au centre. Le Makara garde les allées qui mènent au temple : leur long corps, parfois soutenu par des guerriers, borde les 4 allées orientées selon les axes cardinaux.
Angkor Vat : le plus célèbre des temples (principalement construit entre 1110 et 1150) par le grand roi guerrier Suryavarman II et dédié à Vishnu. Bon, là, on voit plus Pierre en train de photographier le site que le site lui-même ;).
Expériences mystiques en direct à Angkor Vat et au Bayon : dans une gopura (« porte ») qui ouvre sur le sanctuaire sacré, les malades venaient se frapper la poitrine, qui résonne (c'est vrai!!) et ressentir ainsi la bénédiction des divinités ; puis entretien personnel avec une représentation de Bouddha : Martine est à fond ;)!!
Les racines emprisonnent et désassemblent les pierres du temple de Ta Phrom (fin du XIIè siècle), oeuvre de Jayavarman VII et dédié à sa mère. Chaque fois qu'un nouveau roi accédait au trône, le temple du roi précédent était laissé à l'abandon. Quand les rois partirent de la région d'Angkor vers celle de Phnom Penh au XVè sicèle, les temples d'Angkor furent envahis par la végétation et oubliés : seuls les villageois habitants autour en connaissaient l'existence mais les considéraient souvent comme des endroits où habitaient les esprits maléfiques (c'est vrai que toutes ces racines rendent le paysage inquiétant!!). Ce n'est qu'au XIXè et XXè siècles que des français dégagèrent la végétation et découvrir ces temples.
Temple de Bayon dans Angkor Thom (fin du XIIè siècle), siège de la capitale du royaume au moment du règne de Jayavarman VII. Ce temple, dédié à Vishnu et non à Shiva, était composé de 54 tours-sanctuaires, représentant les 54 provinces que comptait le royaume à son apogée. Beaucoup ont été détruites ou pillées.
Une des tours-bibliothèques du temple de Bakong, du groupe Roluos (fin du IXè siècle) : ce qui est intéressant ici, c'est qu'au début de l'ère d'Angkor (période 800 – 1430 où la capitale du royaume Khmer se situait dans la région d'Angkor) les temples étaient construits en brique, beaucoup plus fragile et moins résistante que le grès qui l'a remplacée ensuite.
Une apsara (danseuse royale dédiée au temple du roi, qui tient une fleur de lotus dans sa main droite), son incarnation actuelle et le détail d'un guerrier sur un bas relief
Enfin, tout cela n'est pas de tout repos, il a fallu aussi jouer les aventuriers !! (ici à Beng Mealea, temple du Lac Mealea)
- article et photos et commentaires de Pierre -
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